Sorcière ‽ – Veštica (le titre)

Dictionnaire de l'ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle, Frédéric Godefroy, 1880-1895, volume 7, page 478.

Le problème est évoqué à la fin du roman (p. 471) : comment traduire son titre вештица / Veštica ?

Car ce mot macédonien ne désigne pas une « sorcière ».
La sorcière, féminin  de sorcier, c’est вештерка / Vešterka.

Veštica désigne une femme-maîtresse des arts, d’elle-même, maîtresse de la vie.
L’étymologie macédonienne ne laisse aucun doute, même si le mot est méconnu ou associé au serbo-croate.

Un chroniqueur reprochera d’ailleurs à Andonovski dans la presse d’employer comme titre un mot non-macédonien.
L’auteur démontrera brillamment le contraire et le chroniqueur présenta ses excuses et proclama que Veštica devait impérativement figurer dans le lexique macédonien. (il n’existe pas de dictionnaire « officiel » de la langue macédonienne et nombreux sont les habitants débattant de tel ou tel détail, accent ou cas périlleux au quotidien)

Le titre de travail en français comme en anglais était pourtant « Sorcière » ou « Witch ».
Mais l’auteur réfutait absolument cette simplification.

Plusieurs solutions ont été évoquées : « Sorcière ? », « Sorceresse », « Sorcelages »,…
Sorceresse jouait en français comme Veštica & Vešterka, c’est l’ancien français pour sorcière.
mais cela sonnait trop proche de l’anglais sorceress et surtout trop artificiel, comme faussement vieux. 
Sorcelages changeait le sujet et évoquait les ensorcellements de l’inquisiteur subis par les notables, ceux de Jovana subis par padre Benjamin et finalement ceux du livre lui-même, subis par les lecteurs. Mais là aussi, l’artificialité du mot, présent dans le même dictionnaire de vieux-français, l’a renvoyé aux archives.
(on nous a ensuite signalé la série d’histoires du Sorceleur de l’auteur polonais Sapkowski, à la base du jeu vidéo The Witcher)
– Décidément, rien n’était aussi puissamment évocateur que le mot sorcière.
Pourquoi ne pas lui ajouter un point d’interrogation, introduire le doute, la question autour de l’identité de cette « Sorcière » ? N’est-elle pas autre chose ?

Finalement, ce sont les retrouvailles avec le point exclarrogatif (plus de détails ici) qui ont permis de conserver un titre aux multiples dimensions : qu’on connaisse ou non ce signe de ponctuation biscornu, on y devine l’exclamation et l’interrogation mêlées, une énigme intervient dès la couverture, annonciatrice de celles contenues dans le livre et même d’une partie du livre suivant (« La fille du mathématicien »).

Ce sera « Sorcière ‽ ».

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